En cette période de campagne électorale, il nous parait intéressant de répondre à quelques questions que vous vous posez peut-être en suivant l’actualité…
Qu’est-ce qu’un parti politique et qu’est-ce qu’un micro-parti politique ?
Comment finance-t-on la campagne d’un candidat ?
Comment puis-je donner 15.000 euros à Xavier Bertrand grâce à Valérie Pécresse ?
(Et accessoirement, « Social & Républicain » est-il un micro-parti politique ?)
Autant de questions que vous vous posez peut-être en cette période de campagne électorale, et auxquelles nous tentons de répondre...
Tout d’abord rappelons qu’un parti politique n’est rien d’autre, juridiquement parlant, qu’une association loi 1901, et, qu’à ce titre, un parti politique peut être créé très simplement par… deux personnes.
La déclaration en préfecture est simple, seule particularité : aucune date de naissance ne doit figurer sur cette déclaration.
Depuis 1988 et l’adoption de la loi relative à la transparence de la vie politique, dont l’un des objectifs était de limiter les conflits d’intérêt (on arrête de ricaner au fond), les partis politiques sont soumis à quelques obligations complémentaires, qui en font des associations loi 1901 particulières.
Sont en effet obligatoires pour être un considéré comme un parti politique :
- la désignation d’un mandataire financier ou la création conjointe d’une association de financement.
et
- le dépôt annuel de comptes certifiés. (A noter que cette règle s’applique même si le parti politique n’a pas prévu de faire d’appel aux dons, ou de faire payer son adhésion. Nous avions d'ailleurs sollicité la Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques (CNCCFP) sur ce point précis.)
Et le « micro-parti » dans tout ça ?
Légalement, le terme « micro-parti » n’existe pas. Il ne s’agit pas d’une catégorie juridique particulière, c’est un parti politique tout court, c’est à dire une association loi 1901 soumise à la loi de 1988 relative à la transparence de la vie publique.
Pour comprendre son intérêt, il faut revenir aux modalités de financement des candidats aux élections, et plus particulièrement à la nature possible des donateurs et au plafonnement des dons…
Un candidat finance sa campagne uniquement :
-par les dons privés, qui sont limités à 4600 euros par personne et par an.
-par les dons d’un parti politique, qui, eux, ne sont pas plafonnés.
Toute autre source de financement est interdite (don d’une association autre qu’un parti politique, entreprise etc)…
Les partis politiques se financent quant à eux, via quatre sources :
-les cotisations des adhérents (faible source de revenus en pratique).
-les dons privés, qui sont limités à 7500 euros par personne et par an.
-le financement public (pour les partis qui ont un nombre suffisant d’élus).
-et enfin … par les autres partis politique.
Les micro-partis politiques sont donc surtout des aspirateurs à don au profit d’un candidat, mais aussi, potentiellement d’un autre parti, qui permet de contourner aisément les différents plafonnements légaux.
Travaux pratiques : vous êtes fan du parti LR et vous voulez leur donner 15.000 euros...
Que pouvez-vous faire ? Tout d’abord, changer de tisane et décider d’aider plutôt notre association ou une association amie.
Sinon, vous pouvez faire un don de 7500 euros à LR et un don de 7500 euros au « micro-parti » de Valérie Pécresse, parce que, vous aussi, vous vous sentez « Libres ». Nous ne disons pas ici que le parti politique de Valérie Pécresse s’empressera de faire un don de 7500 à LR, en revanche, nous confirmons qu’absolument rien ne l’empêche de le faire.
Si c’est le cas, vous avez versé en pratique 15.000 euros à LR, avec une déduction fiscale de 66%. Mission accomplie.
Pour finir, rien n’empêche non plus LR de verser ensuite vos 15.000 euros à Xavier Bertrand pour préparer sa prochaine campagne présidentielle en 2037, puisque dans le cas du financement d’un candidat par un parti, il n’y a pas de plafond…
Autre exemple historique, rien n’empêchait Mme Bettencourt de faire un don de 7500 euros à l’« Association de soutien à l'action d'Eric Woerth » ( micro-parti, ayant objet d'aider le responsable politique dans ses campagnes locales), ni Eric Woerth de faire ensuite un don de 7500 euros à l’UMP, parti politique dont il était alors trésorier…
Conséquences ?
De l’aveux du CCNPF lui-même, la plupart des partis politiques sont « majoritairement des partis sans existence réelle ».
Leur objet (dont la définition est obligatoire lors de la déclaration en préfecture) est souvent poétique : « animer l’action politique » par exemple.
Le nombre de ces partis politiques a explosé : 579 partis politiques en France en 2020 (il y en avait 27 en 1990).
En Marche vers un parti politique traditionnel...
Faisons maintenant une petit digression permettant de démonter la « novlangue » de nos start-upers préférés. Le terme de « mouvement » politique est utilisé pour se démarquer, faire neuf, jeune, et dynamique, mais il n’en reste pas moins un parti politique, pur et dur, avec une association de financement associée.
Dès sa création, le mouvement « En Marche » est bien une association dotée d’une association de financement : autrement dit, c’est un parti politique...
Et comme tout parti, il s’active pour récupérer des fonds à coup de dons de particuliers, avec mise en place d’ évènements dédiés, dîners, cocktail etc, généralement chez des ouvriers, des paysans, et des salariés de PME, plus rarement chez des cadres des plus grandes banques (HSBC, BNP Paribas), des patrons du CAC 40, le tout organisé par Christian Dargnat, ex-patron de la filiale de gestion d'actifs de la banque BNP Paribas (au profit de celui qui est encore, en tout début de campagne, ministre en charge de l’économie).
Bref, rien d’illégal dans tout cela mais l’occasion de rappeler, que, rigoureusement :
- « En Marche » était un parti politique dès son lancement, le reste n'est qu'habillage sémantique.
- Le financement de ce parti n’a pas été réalisé principalement par des entreprises du CAC 40 ou des banques, comme certains le sous-entendent perfidement, puisque c’est interdit (pas de financement de parti politique par des personnes morales), mais directement par des personnes physiques, des patrons d’entreprise du CAC 40 et des banquiers par exemple.
Cette thèse a été remise en cause par un cinéaste devenu depuis célèbre, Benjamin Griveaux, lorsqu'il a affirmé que la plupart des dons n’étaient pas des « gros dons » : pourtant, en 2017, 45% du financement de En Marche était le fait de 1,7% de donateurs...
Pour conclure et sans transition, quid de l’association « Social et Républicain » ?
Nous ne sommes pas un micro-parti politique, puisque nous ne sommes pas un parti politique. Nous ne sommes pas soumis à la loi de 1988 relative à la transparence de la vie publique, mais aux règles usuelles de fonctionnement d’une association loi 1901.
Concrètement, nous ne pouvons donc pas financer de candidats au nom de l’association, ni leur apporter une quelconque aide matérielle. Nous pouvons toutefois apposer notre logo sur l’affiche d’un candidat qui le souhaite et qui partagerait nos idées, mais uniquement en noir et blanc, car l’utilisation des couleurs bleu-blanc-rouge est interdite dans ce cas précis.
Nous pouvons surtout travailler, faire témoigner des citoyens sur leur métier, préparer un programme, confronter nos idées, partager nos expériences, préparer des synthèses techniques ou politiques, bref, revenir aux sources de l’engagement démocratique et constituer une véritable… association politique.
Davy LIGER
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